Texte et photographies : Fabrice et Laurent Desage
Photographies d’oiseaux de difficulté 4
On continue à avancer dans le sujet, avec aujourd’hui, un exemple de niveau de difficulté 4. Les espèces qui occupent ce rang sont souvent de véritables défis, impliquant en général d’y consacrer pas mal de temps.
De nombreux essais sont à prévoir. Aucun de ces oiseaux ne garantit la réussite le jour même. En revanche, ils vous garantissent des moments de colère parfois, quand vous constaterez sur l’écran que la photo n’est… »pas tout à fait net… » ( cas le plus terrible qu’il y ait, bien plus dur que la photo complètement floue…!).
Devant les nombreux échecs, (qui ne manqueront pas, une fois de plus, de vous faire bénir le numérique…), un certain découragement peut arriver. Il est humain, on l’a tous eu…
Si vous surmontez ce découragement, il y aura un jour, où enfin, à force de persévérance, la photo, ou mieux, la série de photos d’une rafale, sera là, sur l’écran de « votre »boitier..(Oui !! pas celui du copain…!! Le votre !!)
Ajoutons que pour de tels sujets, les boitiers semi-pro et pro sont préférables, mais des boitiers milieu de gamme peuvent convenir, si la lumière est généreuse.
Le Cincle plongeur :
L’exemple que nous avons choisi pour commencer, va plaire à Daniel, puisque c’est le cincle plongeur.
Pas évident de trouver une rivière suffisamment éclairée par le soleil, puisque l’oiseau est assez coutumier des zones ombragées. Le meilleur moment est de février à avril, quand les feuilles n’ont pas encore poussé.
En général, le cincle a un vol direct, sans brusques changements de direction. La difficulté tient plus à sa relative petite taille, combinée à un vol rapide et rasant.
Beaucoup de temps à prévoir au bord de la rivière…
Les nombreux essais que nous avons pu faire sur le cincle nous avait permis de sortir une trentaine d’images exploitables. On en propose 4, faites le même matin.
Le cincle est ici en vol lancé, sur les 3 premières photos. ces photos sont issues de 2 rafales, dans lesquelles nous avons eu plusieurs photos nettes. Nous avions fait de nombreuses séances depuis près d’un mois, avant cette super matinée de bonne réussite. Preuve est que l’obstination finit par payer…
Le cincle fait parti des premiers sujets rapides que nous avons cherché à faire avec le canon 7D. ( Dés que nous l’avons essayé à Montier, nous avons senti que ce boitier permettrait enfin de se confronter à ce sujet).
Des essais que nous avions faits avec un canon 40D n’étaient pas parfaits, mais encourageants.
Le cincle est petit, et il rase l’eau. Il passe à une quinzaine de mètres de nous (de mémoire, mais estimation difficile dans le feu de l’action…)
Pour qu’il occupe une place assez importante dans le viseur, nous utilisons le multiplicateur sur le 500.
Des focales plus courtes de 300 à 400 (en plein format) peuvent se révéler un peu juste pour photographier le cincle en vol, sauf cas particulier.
La lumière était un peu filtrée, malgré le soleil, et nous avons opté pour la pleine ouverture, à f/5.6 donc. Cela a donné une vitesse de 1/1600e , à la sensibilité de 1000 isos. On le voit, c’est relativement juste niveau lumière, pour figer un oiseau aussi rapide.
La photo 3 bénéficiait d’une lumière plus généreuse, avec 1/2000e pour 800isos.
Une légère sous ex de -1/3 , pour éviter de « cramer » la gorge du cincle, permet aussi de gagner une vitesse.
Pour les collimateurs, c’est ici la zone de 9 collimateurs qui nous parait la plus indiquée, pour maintenir la netteté sur l’oiseau, ce qui est difficile pendant la rafale.
Le bras et le tronc pivotent très vite, au point qu’il est même difficile de bien apprécier l’oiseau dans le viseur, tellement le mouvement est rapide ! Ajoutez à cela le fait que la visée est « saccadée » par la rafale…Dans ces conditions, on comprendra que l’oiseau risque de quitter la zone des 9 collimateurs, et pour éviter que la netteté se perde, il est nécessaire de ralentir la sensibilité de l’AF, avec une valeur de -1, qui permettra de garder la netteté une fraction de secondes avant que l’AF décroche et se recale sur l’eau.
Ce léger retard dans le décrochement de l’autofocus peut ainsi permettre d’avoir une ou deux photos nettes en plus, avant le décrochage.
Mais avec ce réglage, il faut savoir que si l’autofocus accroche l’eau au départ, il se prendra un peu plus de temps avant de revenir sur le sujet…tant pis, on fait avec, tout est dans le compromis.
Avec un réglage rapide, lorsque l’AF va se caler sur l’eau au début, il va réagir plus vite pour se recaler sur le sujet. Mais…Pendant la rafale, si vous lâchez le sujet, la MAP va se décaler a nouveau sur l’eau…En résumé, un réglage « lent » ou « rapide » présente tous les deux des avantages et des inconvénients. C’est la recherche d’un compromis, et des essais aux différentes valeurs, qui vous permettra de choisir les avantages dont vous voulez bénéficier, et les inconvénients, qu’en retour, vous allez devoir gérer…
le cincle peut être moins difficile à photographier lorsqu’il pêche en vol, puisque il va faire de courts vols pas trop rapides, entre les plongées. C’est le moment de s’essayer au défi, d’autant plus que les pattes en avant, l’oiseau est photogénique…!
Voila ce qu’on pouvait dire sur ce sujet, que vous aviez déjà pu voir dans notre fil « Le vol du cincle plongeur », en 2010.
La gorgebleue à miroir :
Nous allons aujourd’hui vous parler d’un sujet délicat à traiter en vol… Les passereaux de petite taille. Vous le comprendrez, c’est bien de difficulté de niveau 4 qu’il s’agit. C’est la gorgebleue à miroir qui va nous intéresser aujourd’hui…
Ce sont certainement les sujets les plus difficiles pour nous, mais aussi pour les autofocus. Très souvent, si l’AF décroche, le photographe y est pour beaucoup. Il est tellement facile de perdre l’oiseau du cadre… ou de ne pas le trouver dès le départ…
Il convient de bien analyser les trajectoires d’envol, puis de retour vers le perchoir. Car c’est bien entendu lors des parades nuptiales, où les oiseaux ont souvent des perchoirs réguliers que ce type de photo va être possible. Une fois ces trajectoires bien comprises, c’est au photographe de paramétrer son boitier, et notamment l’AF…
A oiseau rapide, AF lent conseillé… Sur fond de ciel, pas de soucis. Ca réagit vite et bien malgré une sensibilité de AI servo assez lente. Mais un tel réglage comme nous vous l’avons expliqué lors des situations précédentes va permettre à l’AF de ne pas vous abandonner dès que le sujet va arriver en face de la végétation… Sauf si le collimateur n’est plus sur l’oiseau… (ce qui n’est pas rare face à des scènes aussi rapides)
Bien évidemment, le taux de réussite est assez faible, compte tenu de la rapidité de ces petites boules de plumes dans les airs. Mais à force de persévérer et d’y croire, on finit par accrocher une image où le beau passereau a les ailes et les rectrices déployées… toujours un grand moment de bonheur.
Nous sommes ici en baie de l’aiguillon, paradis vendéen pour cet oiseau. La météo est clémente et permet de travailler à 500 iso pour garder des vitesses très élevées. Les photos sont faites au 500mm à main levée. Le plus gros travail a consisté à trouver un individu de Gorgebleue qui se laissait approcher et que notre présence ne perturbait pas. Nous travaillons à une quinzaine de mètres en moyenne. La plage de MAP sur le télé est donc naturellement réglée entre 10m et l’infini. Parfois, le sujet tombe sous les 10 m… Tant pis.
Pendant deux heures, la Gorgebleue réalise des vols nuptiaux sous nos yeux. Nous ne comptons pas les images ratées qui défilent au dos du boitier. Nous jouons sur les paramètres de l’autofocus, et parfois nous contournons les règles… nous affichons +1 ou +2 sur le AI servo (ce qui signifie qu’en perdant légèrement le sujet la dé focalisation va être instantanée), et parfois ca fonctionne bien car l’oiseau est parfaitement sur le collimateur. Nous jouons aussi sur les collimateurs, mais nous comprenons vite que le groupe de 9 collimateurs du 7D est de loin le plus efficace. Mais il faut bien reconnaître qu’avoir plusieurs images de bonnes dans la même rafale demande un peu d’entrainement. Mais peu importe, ce qui compte est d’en avoir une bonne, une qui vous fasse plaisir et vous laisse pousser un souffle de bonheur dès que vous la découvrirez au dos de votre boitier.
Les hirondelles :
Ce paragraphe concerne des espèces de niveau 4, donc généralement difficiles à photographier. Pour toutes ces espèces, il faut admettre que la plupart du temps, on sera amené à faire beaucoup d ‘essais, pour bien peu d’images réussies. C’est le jeu. Mais consolons nous en nous rappelant que ce genre de jeux était quasiment impensable à l’époque de l’argentique, ou alors pour celui qui aimait cramer des pellicules et de l’argent facilement. La plaisanterie pouvait en effet revenir très chère…
Les sujets que nous avons choisi sont les hirondelles.
Photographier les hirondelles est un des exercices les plus difficiles qu’il puisse y avoir. C’est important de bien en avoir conscience avant de démarrer la séance.Pour se rendre compte, qu’on va avoir beaucoup de déchets, et qu’on va avoir du mal a suivre ces petits bolides aux crochets imprévisibles et incessants. Et c’est humain de les rater, pas de quoi se culpabiliser ! Savoir aussi qu’on va en demander beaucoup, voir énormément a notre matériel, en particulier a l’autofocus. Ils sont très performants aujourd’hui, oui. Infaillibles, non, certainement pas.
Il convient d’entrée de bien choisir le matériel avec lequel on va travailler sur le sujet.
Même si la première photo d’hirondelle de fenêtre est faite avec le 500 et le multi 1.4, il apparait rapidement que de tels objectifs sont rarement très efficaces pour photographier les hirondelles. Les bras tétanisent très vite, en raison des changements de directions soudains des oiseaux, non seulement difficiles à accompagner dans le viseur, mais en plus très éprouvant en raison du poids et de l’inertie du télé.
Tenter avec de gros télés restent donc envisageables, mais rapidement éprouvant.
Les objectifs qui nous paraissent les mieux indiqués sont les zooms 70/200, les télés 300/4, (ou 2.8 à la limite, qui reste relativement « léger »), ou par forte lumière les 400/5.6.
Pour notre part, nous apprécions beaucoup le zoom 70-200/ 2.8 pour photographier les hirondelles. bien sûr cela implique que les hirondelles soient assez près. Pour cela, il est préférable de les photographier dans les environs des nids. Ces oiseaux sont très tolérants envers les hommes, et pour peu qu’on n’aille pas se coller sous le nid, mais à une vingtaine de mètres, sur un point de passage des parents allant au nid, il sera possible de mitrailler souvent.
Pour les hirondelles de rivages, nous avons pu travailler juste à côté des nids, car cette colonie est sur une plage où il y a des baigneurs toute la journée. Elles sont parfaitement habituées aux hommes et les ignorent, même à moins de 10 mètres des nids. Nous faisions les photos très tôt le matin, au printemps, pour être tranquilles.
Avec un zoom de type 70-200, le mouvement de suivi est très fluide, et rapide, ce qui est idéal pour accompagner les hirondelles. Privilégier un réglage lent de l’autofocus sur fond de ciel permet de garder la MAP un peu plus longtemps si le collimateur lâche l’oiseau. Par contre, sur fond de végétation ou d’eau, nous préférons un réglage rapide de l ‘AF.
Dans ce cas, si le fond est accroché dés le départ, l’AF reviendra plus rapidement sur l’oiseau…Et le perdra tout aussi rapidement si on le lâche avec le collimateur. Là encore, tout est une question de compromis.
Opter pour une sensibilité élevée (500 a 800 isos,) permet de garder des vitesses très élevées pour parer à la rapidité des oiseaux, volant à quelques mètres de vous.
Pour un bon rendu, il faut vraiment privilégier les lumières rasantes du matin et du soir. En lumière vive, entre 10 et 16 heures environ, le plumage des hirondelles rend très mal, paraissant souvent foncé, sans reflets.
Lorsque les hirondelles boivent, en rasant l’eau, elles peuvent être un peu moins difficiles à photographier, même si tout est relatif quand nous disons cela. Un bolide reste un bolide…mais il arrive que certaines se trempent brièvement dans l’eau, et permettent ainsi, une petite occasion de les shooter quand elles ressortent, un très bref instant presque figées.
N’hésitez pas à mitrailler, le mode rafale au maximum de ses possibilités vous aidera, même s’il ne fera pas tout.
Dans le viseur, certain crochets seront si rapides, que vous ne les percevrez pas, et c’est seulement sur l’écran du boitier, que vous aurez peut être une surprise.
De nombreux essais, accompagnés de nombreux échecs, permettront de s’améliorer. Et les premières images viendront vous récompenser. A ce moment là, on peut croire que ça y est, on a compris le truc, on va y arriver à tous les coups maintenant…!
Et non…Le lendemain, les résultats sont moyens…le sujet n’est pas conquis. On en prend et en apprend, un peu plus de lui chaque jour. On arrive parfois à le contourner un peu. Mais on ne domine jamais complètement… Et tant mieux… On y retournera sans être sur de gagner… C’est tellement plus motivant…